Une histoire de lectures

La Bible, une arche pleine d’archives

27 février 2024

Pourquoi persistons-nous à lire la Bible ? Il existe tant de bons livres écrits par d’excellents théologiens qui ont lu vingt fois la Bible et su en tirer toute la substantifique moelle qu’ils ont traduite et rendue accessible à nos contemporains…

Mais il se trouve que ce livre accompagne notre civilisation depuis son origine. Il nous sert de référence et d’histoire, de réservoir pour toutes sortes de symboles admirables ou détestables, de scenarii heureux ou catastrophiques.

 

À l’origine était la Bible…

Comme l’écrit le philosophe Jean-Claude Gillebaud, « la plupart des convictions auxquelles nous adhérons spontanément, celles qui sont inscrites dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1948, et qui fondent la démocratie occidentale, trouvent leur source dans le biblique […] Si on cherche à faire la généalogie de ces valeurs minimales et consensuelles, si on tente d’expliquer d’où elles viennent, de quelle histoire, de quelle germination anthropologique, de quels emboîtements successifs elles sont le produit, on s’aperçoit que bon nombre d’entre elles ont lointainement partie liée avec Bible. » (Comment je suis redevenu chrétien)

 

© unsplash

Une leçon universelle

Outre le fait qu’elle nous accompagne depuis plus de 2000 ans, la Bible nous transmet le patrimoine grâce auquel nous avons pensé et pensons encore le monde. Ce n’est donc pas un hasard si un des récits bibliques les plus connus, celui du déluge évoque la construction d’une arche selon le vieux mot français qui, dans la Bible seulement, désigne un coffre (pensez à celui que les Hébreux transportaient au désert). Or le mot « arche » est de la même famille que « archive ».

On connaît, paraît-il, quelque 300 versions de l’histoire du déluge. La plus ancienne daterait du début du 2e millénaire avant notre ère. Une autre a été retrouvée dans la bibliothèque du roi Assurbanipal (668-627). Mais toutes ces versions ont été perdues : la seule qui nous soit parvenue est celle de la Genèse. Inlassablement, celle-là fut l’objet de relecture et source d’interprétations, d’interrogations, de sollicitation à la réflexion. Elle nous raconte comment un jour, un monde prit fin par la faute des humains. Cela peut nous arriver à nous aussi. Elle dit aussi qu’un juste a su, en se montrant solidaire des autres vivants, faire en sorte que la vie a reconquis la terre. Chaque lecteur de la Bible se sait depuis appelé à exercer cette justice qui fait que la vie perdure. L’archive biblique qui comprend cette histoire vieille de près de 4000 ans raconte comment fut sauvegardé le patrimoine génétique de toutes les espèces terrestres, avec insectes et autres oiseaux… dont nous savons qu’ils sont, saison après saison, de moins en moins nombreux !

 

Des mythes pour le présent et l’avenir

Pourquoi persister à relire la Bible ? L’histoire du déluge se termine par la promesse faite par le SEIGNEUR que plus jamais, il ne déchaînerait le déluge (Genèse 8.21-22). Ce dernier ne viendra pas de Dieu. Jésus pourtant annonce qu’au retour du Fils de l’humain, arrivera ce qui advint au temps de Noé (Matthieu 24.37-38). Se pourrait-il que la fin vienne des humains ?

Présent dans nos archives, le mythe vieux de plus de 3000 ans nourrit comme jamais notre imaginaire.

Jean-Pierre Sternberger
Bibliste régional

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