Olivier Abel, philosophie et d’éthique
Le poste d’enseignant-chercheur en philosophie et éthique qu’Olivier Abel occupe à l’Institut Protestant de Théologie depuis 1984 (30 ans à Paris, 9 ans à Montpellier) a une longue histoire.
À Paris il a réuni un demi-poste en morale auparavant occupé par André Dumas, et un demi-poste en philosophie jadis occupé par Paul Ricœur. À Montpellier, il était occupé par Jean-Daniel Causse pour l’éthique et par Marc Boss pour la philosophie, eux-mêmes succédant à Jean Ansaldi et à André Gounelle. Mais jadis Georges Crespy occupait ces deux demi-postes. Cette histoire montre une oscillation de l’éthique entre un rattachement à la philosophie ou à la dogmatique. Mon long mandat de professeur à l’IPT a fortement tendu à mettre en avant la philosophie, et à donner aux questions éthiques une consistance qui empêche son écrasement entre l’évangile pur et les sciences sociales et humaines.
Un enseignement qui a évolué
J’ai cherché à enseigner la philosophie tantôt comme un exercice interrogatif, considérant le monde à partir d’une question vive et inédite (le jeu, l’insouci de soi…), tantôt comme la formation d’une culture philosophique essentielle à la théologie de chaque époque (Platon et Aristote, Hobbes et Spinoza, Bayle et Leibniz, Rousseau et Kant, Hegel et Kierkegaard, Emerson et Nietzsche, Wittgenstein et Arendt, Levinas et Ricœur). Et j’ai cherché à enseigner l’éthique alternativement à partir de questions d’éthique élémentaire (en je : le courage, l’habitude, la sexualité et le couple, l’humiliation, le pardon…) et à partir de questions d’éthique politique (en nous : la ville, la laïcité, la démocratie, la guerre, le tourisme, la crise écologique, l’histoire…).
Le rôle de l'enseignant-chercheur
L’enseignant-chercheur en philosophie et éthique est chargé de l’enseignement en Licence et Master pour la formation des ministres et des laïcs, et de tout public intéressé, venant souvent du dehors de nos Églises. Il est rattaché à une équipe de recherches universitaire, à l’Université Paul Valéry à Montpellier ou à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales à Paris. Il peut arriver qu’il crée lui-même un centre de recherche, comme je l’ai fait pour le Fonds Ricœur à Paris. En tous cas, sa fonction est aussi de former des Docteurs, qui constituent selon Calvin, à côté des Pasteurs, des Anciens et des Diacres, l’un des quatre ministères de l’Église - qui demandent tous une robuste formation.
Faire rayonner la pensée protestante
Mais sa fonction n’est pas seulement celle d’un enseignant, formant de futurs pasteurs, ni celle d’un chercheur, reconnu par ses pairs du monde universitaire. C’est aussi celle d’un intellectuel engagé à la fois au dedans de la communauté protestante, contribuant parmi d’autres à constituer un tissu de questions communes, un langage commun, et en dehors de celle-ci, de manière à faire rayonner la pensée protestante dans la société contemporaine et ses médias - environ 1200 textes en 40 ans, pour ma part. C’est ainsi que j’ai sans cesse cherché à équilibrer les engagements intérieurs au protestantisme et les engagements extérieurs - plus de 1500 conférences en 40 ans.
Je ne compte pas ici les fonctions administratives et les responsabilités éditoriales, mais je voudrais ajouter encore une quatrième fonction, qui n’est plus celle de l’enseignant, de l’intellectuel ni du chercheur, mais celle d’un poète de la parole biblique, au sens où peut l’être un prédicateur, un liturge, un orant - les 100 prières possibles d’André Dumas, par exemple, ou la méditation des lis et des oiseaux par Kierkegaard. C’est cette dimension qui m’a le plus manqué.
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Série "A la rencontre des enseignants de nos facultés de théologie"
Institut Protestant de Théologie : https://ipt-edu.fr/