Paul Ricoeur, le courage du compromis

Ce parcours, intelligent et bien écrit, croisant la vie et les engagements de Paul Ricœur, n’est pas vraiment une biographie philosophique, mais un regard rafraîchissant et sans concession sur les choix intellectuels et politiques de ce grand protestant mort en 2005. Le penseur du dialogue et le chrétien engagé s’y côtoient et s’interpellent, autour de la notion de compromis mis en exergue par l’auteur. Le premier garde toute sa richesse – surtout en ce temps de radicalité – et toute son actualité – sur la laïcité ou la reconnaissance des minorités. Mais le second bute sur l’expérience politique du réel et sa difficulté à considérer lucidement les régimes socialistes. Comme pacifiste de l’entre-deux-guerres et, on le sait davantage, comme doyen de Nanterre, sa passivité devient faute, dira-t-il lui-même, et son désir de dialogue avec les révolutionnaires, impuissance. Son engagement ultérieur sur la décolonisation le montrera plus tenace et… moins ouvert aux compromis. Étonnant toutefois que l’éditeur ait placé ce bel ouvrage dans la collection « résistants ».