Guilhen Antier, la théologie systématique
Dans le cadre de l’IPT (facultés de Montpellier et de Paris), où sont formés non seulement les futurs ministres de l’Église protestante unie de France, mais aussi toute personne qui souhaite bénéficier d’un libre espace de réflexion sur les questions existentielles, religieuses, bibliques, j’ai la responsabilité, à Montpellier où j’exerce, d’enseigner la théologie systématique, et plus particulièrement la discipline qu’on appelle la dogmatique.
Le christianisme mis en relation avec les questions contemporaines
Sous ces noms qui aujourd’hui résonnent d’un écho un peu étrange, voire inquiétant, se dit en fait, très simplement, le souci d’étudier les énoncés du christianisme dans une démarche réflexive, interrogative et critique, pour montrer la cohérence, la crédibilité et la pertinence de la proposition chrétienne en lien avec les questions contemporaines. C’est le sens du mot système : mettre en relation la foi et la culture, pour les éclairer mutuellement. Je dis souvent à mes étudiantes et étudiants que faire de la dogmatique, c’est se donner les moyens de ne pas être dogmatique.
Le sens de l’histoire
Parmi les questions qui m’occupent depuis quelques années, il en est une que l’actualité a remise au goût du jour : celle du sens de l’histoire. Pour au moins deux raisons : d’abord, la crise environnementale dans laquelle nous sommes plongés nourrit des angoisses de fin des temps qu’il faut pouvoir accompagner par une réflexion théologique responsable (comment continuer à espérer dans un monde désespérant ?) ; ensuite, le pouvoir poutinien, qui conduit la guerre en Ukraine, mobilise dans sa propagande des éléments de théologie de l’histoire avec la complicité d’une partie du clergé orthodoxe, qui n’hésite pas à faire de la « sainte Russie » le bras armé de la Providence dans un combat entre le bien et le mal (on pourrait d’ailleurs soupçonner la rhétorique occidentale d’appliquer un schéma similaire, en inversant bien sûr les positions). Comment, dans un tel contexte, se ressaisir de la question complexe et redoutable de l’histoire et de son sens ? Comment articuler l’histoire humaine marquée par le tragique, la répétition du malheur, et le Royaume qui ouvre un horizon où « le loup habitera avec l’agneau » (Ésaïe 11.6) ? Comment penser la responsabilité humaine dans l’histoire, sans faire de l’humain le maître de l’histoire sur qui reposeraient ultimement le jugement et le salut du monde – et sans, non plus, le condamner à la passivité ou à l’impuissance ? Comment penser l’intrication de la cité terrestre et de la cité céleste dans le déroulement tumultueux et, à tant d’égards, obscur de l’histoire ?
Nous avons abordé ces thématiques avec mon collègue Olivier Abel dans un cours public lors du premier semestre[1]. Elles feront aussi l’objet, entre autres, d’un colloque organisé à l’université Paul-Valéry Montpellier 3 à l’automne prochain. Occasion de rappeler que l’IPT est, indirectement, le visage de l’EPUdF dans le monde académique, mettant en jeu la crédibilité d’une parole théologique protestante dans les lieux de savoir et de débat, au-delà des cercles ecclésiaux.
En savoir plus
[1] Vidéos disponibles sur la chaîne Youtube de l’IPT : https://www.youtube.com/playlist?list=PL_tKQA4G9oj9Rcw1aCbjyo9_CLTFgJrCl
Série "A la rencontre des enseignants de nos facultés de théologie"
Institut Protestant de Théologie : https://ipt-edu.fr/