Maryse et François Berni
L’un est tombé dans le chaudron du protestantisme lorsqu’il était petit, l’autre absolument pas et même pouvait considérer avec méfiance ce qui ressemblait de près ou de loin à une Église. Mais c’est à deux que Maryse et François Berni ont cheminé depuis le lycée, dans des engagements autour de l’Église.
Ils se sont rencontrés au lycée. François était né dans une famille protestante et son père était déjà fortement impliqué dans la Cimade lorsqu’il a rencontré Maryse. C’est pourtant Maryse qui entraîne François dans leur premier engagement commun, aux Éclaireuses et éclaireurs de France, mouvement de scoutisme laïque. Pendant deux-trois ans, ils encadrent de jeunes louveteaux, au cours de leurs études respectives. Maryse est à l’époque plutôt méfiante à l’égard de toute Église : « avec François et mes beaux-parents, j’ai fréquenté de plus en plus l’Église protestante. Mais pendant longtemps, j’y suis plutôt rentrée à reculons pour pouvoir en sortir plus vite, si jamais… »
Plus de 40 ans après, malgré toute leur disponibilité pour les autres, il faut jongler au milieu de leurs agendas, tant leurs engagements associatifs et ecclésiaux sont nombreux et leurs voyages aux quatre coins de la région Auvergne–Rhône-Alpes se multiplient avec la naissance récente d’un sixième petit-enfant. Bourg-lès-Valence où ils vivent, Grenoble, Chambéry ou Villeurbanne, où sont installés leurs trois enfants et leurs familles, Clermont-Ferrand, où habitent encore les parents de Maryse, sans compter les voyages vers l’Asie du Sud-Est qu’ils apprécient particulièrement, ou en bien d’autres lieux… les journées sont visiblement bien remplies pour ces deux-là. « Pas ce soir, nous avons une assemblée générale extraordinaire ; pas demain, nous sommes toute la journée à l’assemblée générale régionale de la Cimade ; dans trois jours, nous partons dans le Sud retrouver des amis anglais et allemands des années lycée pour quelques jours… », finalement, on se sent privilégié d’avoir eu le temps de l’échange avec Maryse et François pour ce portrait à deux !
Le goût de l’autre
La rencontre entre le petit-fils d’immigrés italiens et « l’Auvergnate pure souche » a été marquée dès ses débuts par l’envie de s’engager en faveur des autres et le goût de la découverte de l’inconnu, de celui qui a une vie différente. Dès leurs études supérieures bouclées, François comme ingénieur en électronique, Maryse comme institutrice, ils mettent les voiles pour l’Algérie. François y est dans le cadre de la coopération du service national obligatoire, pour conduire des TP et TD (travaux pratiques et travaux dirigés) au sein de la Faculté d’Alger, Maryse a trouvé une place en tant qu’enseignante de français dans un lycée de la ville. « C’était important pour nous de vivre une expérience hors de France », disent-ils. « Par ailleurs, nous avons vécu un véritable décalage entre le moment de notre départ de France, les deux années 1977-1979 que nous avons vécues en Algérie dans des conditions spartiates et notre retour en France. En l’espace de deux ans, les supermarchés avaient fleuri partout ; alors que nous avions découvert un mode de vie plus sobre, la France s’était engagée dans cette société de consommation à outrance… Ça a laissé des traces en nous. Et nous continuons à essayer de vivre un peu plus sobrement. »
Au service de l’Église…
À leur retour en France, Maryse et François s’engagent dans leur Église de Bourg-lès-Valence. François entre au conseil presbytéral, Maryse accompagne les camps d’enfants et de jeunes lorsque leurs enfants entrent à l’école biblique puis au catéchisme. « Avec le pasteur Alain Arnoux, nos enfants ont été marqués par une éthique, un rapport et une attention aux autres et par une liberté de penser, découverte par une lecture libre et nourrissante du texte biblique. J’ai finalement moi-même été vraiment au bénéfice de ces moments », souligne Maryse. Alors que Maryse s’engage également dans l’association œcuménique Partageons qui fait du travail social auprès des plus démunis, François reste pendant 24 ans au conseil presbytéral et est invité, rencontre après rencontre, à prendre des responsabilités à d’autres échelons de l’Église. « J’ai fait partie pendant quelques années de l’équipe régionale Mission, avant que la question missionnaire soit reprise par la coordination témoigner-servir. Et quand, au terme de mes 24 années de mandat, j’ai donné ma démission du conseil presbytéral, j’ai rapidement été sollicité pour faire partie de la nouvelle équipe de la coordination régionale. Comme je le dis parfois, j’ai arrêté mes responsabilités au conseil presbytéral, mais l’Église m’a rattrapé par l’oreille… »
… par le service des autres
De rencontre en rencontre, l’un et l’autre ont poursuivi leurs engagements respectifs et communs. Maryse a quitté Partageons à l’heure de la retraite pour prendre la responsabilité du groupe Cimade de Valence et entrer au conseil régional de la Cimade. François est aujourd’hui également au bureau de l’association de soutien Oikocredit Centre-Alpes-Rhône, ainsi que l’un des membres de l’équipe de préparation des journées annuelles de la Mirly (Mission dans l’industrie de la région lyonnaise). L’un et l’autre disent que l’Église gagnerait à s’investir plus dans ces associations et ces problématiques sociales. « On parle d’évangélisation, mais elle passe par là, par ces lieux qui viennent interpeller les gens sur la société que nous construisons ensemble… »
En savoir plus
Réseau 26
Réseau 26 est un réseau informel, calqué sur le réseau Ésaïe de Grenoble, que Maryse a lancé avec la Cimade de Valence et avec le soutien de Michel et Anne-Marie Cauzid, de Grenoble. Afin d’assurer un accompagnement plus pérenne dans un contexte de forte augmentation des demandes d’hébergement d’urgence, le diaconat protestant de Grenoble avait lancé le réseau Ésaïe en 2010. Ce réseau a pour vocation d’accueillir les demandeurs d’asile « prioritaires » ou soumis au « règlement de Dublin » (qui doivent être renvoyés dans le pays européen où ils ont fait leurs premières démarches de demande d’asile), les déboutés du droit d’asile ou de séjour qui font un recours juridique, et les personnes ayant rouvert des dossiers de demande d’asile ou de séjour. Les membres du réseau sont volontaires et l’hébergement est de durée limitée (quinze jours), avec une rotation de l’hébergé chez les différents membres du réseau.
C’est sur ce principe que s’est lancé Réseau 26. Il compte à ce jour déjà une centaine de familles qui hébergent pour le moment 18 jeunes majeurs étrangers isolés.