Les nonante-cinq thèses
Le consistoire de Bourgogne a proposé, sous la conduite du pasteur Jean Dietz, des rencontres bimestrielles autour des thèses affichées le 31 octobre 1517 (et non un an auparavant comme « empoissonné » en avril).
Une première approche a replongé les participants (une quinzaine) réunis au temple de Mâcon, dans l’atmosphère du petit peuple de l’église au XIVe siècle — fin du Moyen Âge — tenaillé par l’angoisse de la mort devant une piété incomplète et un amour imparfait (thèse 14).
Contre les indulgences…
Rappelant ce que sont la vraie pénitence et la contrition dont « les canons ne s’appliquent qu’aux vivants » (thèse 8) Luther s’élève contre les prédicateurs des indulgences qui « prétendent qu’aussitôt que l’argent résonne dans leur caisse, l’âme s’envole du Purgatoire » (thèse 27) considérant que ceci est un abus de pouvoir dans la prédication. L’argent des fidèles sera mieux employé pour leur subsistance et pour la solidarité qu’à l’achat d’indulgences.
… mais pas contre le pape…
Dans une première partie de controverse très universitaire (il est docteur en théologie), Luther ne met pas en cause l’action du Pape et son autorité, lui qui ne semble pas être informé de tels agissements « il ne faut pas mépriser les grâces que le Pape dispense… » (thèse 38) et plus loin, « … si le Pape connaissait les exactions… il préférerait voir la basilique Saint-Pierre réduite en cendres… » (thèse 51). Il faut enseigner aux chrétiens la fidélité du Pape à son devoir qui est la prédication de la parole de Dieu et non celle des indulgences ; l’imprudence de cette dernière « rend difficile de défendre l’honneur du Pape contre les calomnies ou les questions insidieuses des laïques » (thèse 81).
Devant les critiques discordantes qui s’élèvent des universités non confessionnelles (en particulier des Pays-Bas), le propos de Luther devient plus incisif : « Pourquoi… pourquoi… ? » (thèse 81 et suivantes) mettant en cause l’édification de Saint-Pierre avec l’argent des « pauvres fidèles » et les richesses du Pape « plus grandes que celles de l’homme le plus opulent » (thèse 86). Les anciennes lettres d’indulgences étaient suspendues pour en vendre de nouvelles, et les opposants laïques devaient être soumis par la violence.
… pour le Christ
L’exhortation finale appelle les chrétiens à suivre le Christ avec « beaucoup de tribulations » et non à se reposer sur la sécurité d’une fausse paix assurée par l’achat des indulgences.
Toute l’argumentation de Luther nous est apparue dirigée contre la dérive manifestée dans la prédication des indulgences qui, par leur achat, assureraient le salut alors que l’argent sert à la construction de Saint-Pierre et un peu à « garnir les poches des collecteurs ».