Chrystel Bernat, histoire moderne
J’ai consacré ma thèse de doctorat à la Guerre des Cévennes dont une somme en deux volumes est à paraître en 2024 chez l’éditeur Honoré Champion (dans la collection « Vie des Huguenots »).
Scrutant les formes de violences larvées qui trouvent à s’exprimer à l’heure de la prise d’arme camisarde, je renouvelle fondamentalement l’approche du conflit en explicitant ce que le contexte spécifique de la révocation de l’édit de Nantes induit en matière de déchirures civiles – et dans l’exercice de la violence religieuse et jusque dans l’originalité de cette guerre qu’elle appréhende comme une guerre civile dérobée.
De la recherche…
Dans cette enquête issue d’une recherche engagée durant plus de cinq ans dans une multitude de fonds français et étrangers (en Suisse, en Angleterre et en Italie avec le concours de l’École française de Rome), j’explore, à partir de sources inédites, tirées notamment des Archives secrètes du Vatican, les mécanismes de basculement d’une société en guerre et la part de catholicité du conflit en analysant la prise d’armes huguenote à l’échelle non plus protestante ou royale mais sociétale, qui fait cas de l’attitude des populations du théâtre.
Je cherche à comprendre la singularité de ce conflit armé qui voit s’affronter réformés, sujets catholiques et représentants de la monarchie en une infinité de combinaisons guerrières.
Un conflit d’une extraordinaire densité, sans exemple sous le règne de Louis XIV et sans équivalent dans l’histoire des conflits religieux du royaume. Il pose la question de la guerre après les guerres de Religion et des formes d’affrontements confessionnels entre catholiques et protestants dans le cadre spécifique du régime révocatoire et de l’absolutisme politique, lorsque la violence civile se déploie à couvert de la répression légale du protestantisme et d’une violence d’État dont le pouvoir entend garder le monopole.
L’ouvrage vise à rendre compte de ce cadre singulier des rapports de force confessionnels faussés par la persécution royale. Cadre informel dans lequel s’exprime un clivage religieux et une guerre fratricide dégagée de ses emblèmes de lutte traditionnels – en partie absorbée dans la violence du pouvoir –, et qui pourtant fait rage entre les sujets.
… à l’enseignement
Cette recherche sera l’occasion d’un séminaire dispensé en Master. L’enseignement en Histoire dite moderne (qui désigne l’histoire des 16e-18e siècles) m’offre surtout d’enseigner l’histoire des Réformes, cœur battant du programme, qui s’intéresse à l’histoire de leur lente maturation dès le Moyen Âge et à la Renaissance, de leur éclosion et déclinaisons en Europe au cours du 16e siècle.
S’ajoute cette année un cours sur la fabrique du fidèle chez Calvin qui, à partir de ses lettres, sermons et traités, examine la construction historico-théologique de la notion réformée de fidélité à Dieu. Une question brûlante qui traverse les siècles et dont il reste stimulant d’analyser comment les réformateurs l’ont comprise, conçue et défendue.
L’année sera l’occasion de poursuivre mes travaux actuels centrés sur l’histoire culturelle de l’épreuve qui prévoit cette année un colloque international à l’Université Paris Nanterre.
En savoir plus
Docteure en Histoire de l’École pratique des hautes études, et professeure à l’Institut, Chrystel Bernat occupe depuis 2013 la chaire d’Histoire du christianisme à l’époque moderne.
Série "A la rencontre des enseignants de nos facultés de théologie"
Institut Protestant de Théologie : https://ipt-edu.fr/